CAMEMBERT Orteil négatif  Un album symphonique parsemé de SF

 A quelques minutes de l’Illiade, un samedi soir d’avril à Strasbourg, vers 20h00…

camembert_gdMême en roulant super vite, je vais arriver en retard. J’en profite sur la route pour me remémorer quelques détails que Juliette m’a confiés sur le groupe : Grâce à leur résidence à l’Illiade à Strasbourg, depuis une semaine, leur concert est gratuit. 

Je n’ai  jamais entendu parler du groupe. L’évocation du nom seul CAMEMBERT, a fait apparaître de petits ronds jaunes odorants sur ma page Google, en vain de vidéos Youtube sur lesquelles je devais reconnaître l’instrument de Juliette, le trombone.

Et pourtant ! Le groupe existe depuis une dizaine d’années. Il est signé sur un label à Milan, et a sorti deux albums – le dernier s’appelle Orteil Négatif. 

Bref, j’arrive sur les lieux. J’entends déjà de loin que c’est en effet dynamique et puissant. Le concert a débuté, mais j’ai heureusement le droit d’y rentrer. Je m’approche, j’ouvre les portes, et c’est une gifle musicale qui m’attend. 

La même grande claque pour chacun d’entre nous, spectateurs, qui jusqu’à ces premières secondes, songions bien trop naïvement à notre dernier repas. L’endroit où nous avons réussi à attacher notre vélo et comment le retrouver. Bref, des futilités à abandonner, face à une apparition. Une éclosion de plus grande envergure, le commencement d’un mirage.

 

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Quarante-deux instruments ont été utilisés pour son enregistrement, qui a duré plus d’un an et demi en raison de sa complexité. Sur scène, sept musiciens : Pierre, à la basse, Valentin, à la guitare (et Scriptman) ; Léla Frite, à la voix, Fabrice, aux percussions, Juliette au trombone, Clarissa au xylophone, Guillaume à la harpe, et Adrien à la trompette. Plongés dans de la science-fiction dès les premiers morceaux, les auditeurs sombrent/chutent dans un voyage multicolore, fait d’images de Comics dynamiques et précis, d’une explosion rythmique et symphonique dont ils ne ressortiront pas indemnes.

Vous comprenez dès les premières secondes du premier morceau que le voyage vers lequel vous vous embarquez n’est pas anodin. Faites de rencontres hallucinantes et furtives, les scènes s’enchaînent et s’entremêlent. Un résultat détonnant, poétique et d’un dynamisme rare. 

 Au fur et à mesure que le titre avance – que vous avancez – vous cernez peu à peu votre environnement : vous êtes à bord d’une navette spatiale. Cela ne fait aucun doute. Une ambiance quasi-aquatique vous entoure et vous confirme que votre navire spatial est seul au milieu d’un monde inconnu, potentiellement hostile. 

C’est la chute (Once Upon A Time In The Galax-Cheese).

illustration-concert-de-camembert-rock-progressif_1-1519995862Ambiance plus tropicale sur le second morceau : vous avez potentiellement atterri sur une terre inconnue. Vous ne savez pas si votre entourage est ami ou s’il vous veut du mal, s’il cherche à vous séduire et pourquoi. Le xylophone est prédominant. On imagine une parade amoureuse un peu dangereuse, insistante, envoûtante. Vous vous laissez un peu faire, parfois vous combattez. Puis vous succombez (Fécondée par un extra-terrestre).

Rythme plus groovy sur le troisième morceau, on est en plein dedans. Mieux vaut l’écouter pour s’en faire une idée (Gros bouquin). La musique de film et la bande dessinée belge des années 1970 sont clairement ses mentors, nous avoue Pierre : changements de métrique fréquents, doublures basse / trombone, association guitare acoustique et trombone.

Là, on va faire une pause pendant le voyage et communiquer sur les dates à venir du groupe : 

Rock in Opposition (Carmeau, France), 16 septembre ;

FreakShow ArtRock-Festival (Würtzburg, Allemagne), 22 septembre 2018.

Retournez à vos sièges, replongez-vous dans le titre le plus mélancolique de la fresque lyrique d’Orteil Négatif : The Lament of the Prof. Frankenschnörgl. 

Isolé dans son propre monde, le professeur solitaire se lamente de ses journées ennuyeuses à songer, seul. Il s’interroge rêveusement, paresseusement, sur les possibilités pour lui de rencontrer le monde, puis de s’en débarrasser (ce qu’il a probablement déjà en partie accompli à l’occasion du premier album, Schnörgl Attakh). L’air est méditatif. L’histoire du professeur Frankenshnörgl fait la paire avec le premier album. Ce dernier narre une histoire en rapport avec les Schnörgls et une arme de destruction massive que le Prof tente de mettre au point. 

La Lamentation du Professeur Frankenschnörgl est le seul titre qui soit chanté, grâce à la participation de Léla Frite. 

Voilà. Vous savez presque tout.

Non ?

Eh bien, non !

… parce que : « et Skwitch, dans tout ça » ? 

Eh bien, rien à voir : Skwitch, c’est un éléphant cybernétique du futur. Mi-éléphant, mi-cyborg, il est équipé de plein d’implants technologiques (« comme Dark Vador, tu vois ? » Dixit Pierre) et a été développé dans une base secrète à Strasbourg, où il reste détenu à l’intérieur d’une affreuse et exigüe cellule. Il est triste. Il perçoit les sons émergents des festivités du marché de Noël. Il défonce sa cellule, détruit le centre-ville de Strasbourg avec sa cathédrale, il écrase les gens avec ses grandes pattes dans un bruit horrible que des générations de gens traumatisés n’oublieront jamais : « Skwitch » (Skwitch).

Finalement, on retourne dans notre Galax-Cheese, et on y retrouve le fils de la femme fécondée par un extraterrestre, dont on a parlé dans le second morceau. El Pulpo est mi-poulpe, mi-humain, et malheureusement pour lui, ne communique guère qu’avec des sons stridents, qui se répercutent partout dans le cosmos (El Pulpo).

C’est la fin de l’album Orteil Négatif – mais pas la fin du concert. Deux nouveaux morceaux vont clore l’événement  : Le Concierge, issu de la véritable rencontre de Pierre et de son concierge, un passionné d’astrophysique qu’il rencontre quelques heures seulement avant sa disparition, et Le Testament Espagnol, lui-même inspiré du livre éponyme d’Arthur KOESTLER sur la prise de Malaga par les fascistes, une nouvelle que Pierre lit pendant un voyage à Burgos en Espagne. 

Notons que Léla Frite aura une voix plus présente sur ces deux titres, ayant intégré le groupe il y a deux ans lors d’une rencontre à l’espace Grün à Cernay (68), c’est-à-dire peu de temps encore avant le début des enregistrements. Ces deux titres, qui sont donc inédits, vont constituer le matériel du prochain CD… En attendant la prochaine sortie, l’équipe de We Like Music et de Sampler Music vous invite à vous rendre à l’un des prochains concerts du groupe, dont la mise en scène a été coachée par Didier N’Didia du nouvel espace L’Art en Contre de Strasbourg, issu d’un financement participatif lancé il y a quelques mois.

Alors si vous aimez ! En tout cas, nous, on a adoré. N’hésitez pas à vous rendre sur leur Site Web ou à prendre contact avec les membres du groupe via leur Page Facebook : le groupe cherche actuellement un tourneur.

Et merci à Pierre et Juliette pour vos précieux renseignements !