L’édito : entre Elvis et Nixon

Didier-nina 002« Ma Loute », film de de Bruno Dumont, sorti le 13 mai 2016, est un secret de compréhension. Vos réactions à mon dernier édito m’auront fait comprendre combien vous avez réalisé qu’il ne s’agissait pas d’une comédie – au mieux d’une satire – mais bien d’une histoire pathétique. A revoir !

Croyez-moi si vous vous le voulez, mais nous vivons un monde de fous.

Parmi les cadeaux que l’on propose dans certains catalogues de cadeaux (Objets du mois de la rentrée, l’Homme moderne, etc.) la proposition, pour 24,90€, d’un « cadenas d’apprentissage », transparent pour mieux en comprendre le mécanisme, avec deux clefs et quinze outils permettant l’initiation – n’ayant pas peur des mots – au crochetage. Une panoplie libre de vente avec un mode d’emploi. « Casse-tête !… bluffant !… comme dans les films policiers !… » disent-ils dans la pub.

Parmi d’autres folies, la révélation de l’entente entre Elvis Presley et le Président des Etats-Unis, Richard Nixon.
Le premier sait à peine écrire mais collectionne tous les badges policiers de divers états, ce qui l’aide bien dans ses déplacements tout comme pour ses armes et médicaments.
Le deuxième est acariâtre, loin d’être rock’n’roll. On ne l’appelle jamais par son prénom et il est loin de se douter – lui qui ne craque pour personne ni pour certains problèmes critiques -, qu’il sombrerait au chantage de sa fille cadette Julie dans cette pantomime, rien que pour un autographe, dévoilant ainsi certaines de ses faiblesses.

Le 21 décembre 1970, Elvis Presley se rend à la Maison-Blanche où il demande à parler à Richard Nixon, alors Président des États-Unis. Dans l’avion, le célèbre artiste écrit (difficilement !) une lettre au Président dans laquelle il dénonce les problèmes de drogue dans la société.
Elvis the Pelvis (ainsi surnommé à cause de ses déhanchements sur scène) veut lui exprimer en ses termes que, « étant bien introduit dans le milieu de la drogue et de la dépravation », il souhaiterait être engagé comme agent infiltré autonome au Bureau des narcotiques, pour lutter contre le trafic de stupéfiants.

En fait, l’artiste – pourtant surveillé par le FBI pour le tapage qu’il crée lors de ses concerts – cherche un badge fédéral. Les médias « mauvaises langues » diront que ce badge du FBI lui permettra de mieux circuler avec armes et médicaments.

Nixon le Républicain, qui n’est qu’au début de son mandat, est alors assez impopulaire auprès des jeunes.
Nous sommes en effet en pleine guerre du Viêt-Nam et la révolte du peuple exsude par les textes des Beatles, des Stones, de Dylan que Presley n’hésite pas à critiquer, à condamner. Il fustige les journalistes et dénonce l’anti-américanisme de John Lennon. Pour lui la débauche est réelle. Les gens se mettent « à poil » à Woodstock, la musique est agressive, contestataire et engagée, la drogue coule à flots.
Ceci dit et cela n’engage que moi, il y aura eu moins de dégâts psychiques par la drogue que par la guerre au 17ème parallèle.
Ainsi donc, après avoir dépouillé certains bluesmen noirs des années 1926 à 1960 de textes et de musiques, notre nouveau bienfaiteur de la jeunesse se présente en redresseur d’immoralité.

Les conseillers du Président voient là une façon d’améliorer l’image du « Boss » (dixit Presley).
Initialement, celui-ci refusera la rencontre mais finira par l’accepter, cédant aux implorations de sa fille, première groupie du chanteur.

La photo de leur poignée de mains deviendra légendaire.
Elle aura fait l’objet d’insistance de la part de l’ancien Commandant Nixon auprès du Sergent King, loin de toute éducation, ce dernier refusant d’emblée et avec acharnement ce geste protocolaire.
Presley offrira au Président, pour l’occasion, un très beau cadeau. Vous l’aurez deviné :
… une arme de poing !

Tout est réel !…

Le film de Liza Johnson, Elvis & Nixon sorti en juillet, parle de ce fait.
Parlons-en ! J’étais le premier à courir pour le visionner. Quelle déception !
Pourtant de bons acteurs, Michael Shannon ou David Krüger en VF pour Elvis Presley et Kevin Spacey ou Gabriel Le Doze en VF pour Richard Nixon, qui ne ressemblent en rien aux personnages réels. On peut aussi se demander, malgré la réalité des faits, si Nixon aurait bien accepté autant de convivialité et d’incorrection de la part de l’ artiste.

Nous, nous n’avons pas de « King ».
Mais en fouillant bien le magazine, vous découvrirez d’autres grands talents.

See you later !…
Didier-Patrick BEUDAERT